Depuis
les six derniers mois, tout le monde et nous aussi observons l’activité
politique féerique en Ukraine. Nous observons et en même temps,
nous y participons. Parfois, sans même s’en rendre compte. Et non
seulement au niveau de toute une gamme de sentiments et d’inquiétudes,
du désespoir au triomphe, de l’admiration à la colère.
Beaucoup
d’observateurs pas très perspicaces voient le Maidan comme une certaine
révolution ukrainienne locale ou même une rébellion. Une
rébellion contre les kleptocrates, ou plus simplement, contre les petits
voyous. Voila que le peuple ukrainien, toujours pacifique et gentil, n’a pas
supporté une telle offense et s’est revolté. Il s`est
révolté spontanément, comme il pouvait. C’est ainsi que
l’on imagine ce qui s’est passé sur la Place d’Indépendance (place de Maidan)
Kiev et en Ukraine.
Mais
c’est un événement qui revêt une ampleur bien plus large.
Et l’annexion de la
Crimée par la Russie de Poutine, la menace d’une guerre
à grande échelle entre l’Ukraine et la Russie, la confrontation de
la Russie avec
le monde entier sont des éléments dans une série des
événements bien plus large dans laquelle Maidan a
été une pierre fondamentale: elle s’était explosée
et toute la construction de l’ordre mondiale crée en 1945 lors de la
conférence d’Yalta s’est effondrée.
Dans
le sens juridique international, le plus important, c’est que la
conférence internationale d’Yalta et les conférences similaires
fixent, c’est que « les accords doivent être respectés » — pacta
sunt servanda.
Depuis
plus de 100 ans, nous observons une chaine infinie de guerres qui se suivent.
La Première
Guerre Mondiale a été suivie par
la Seconde Guerre
Mondiale. C’était une tentative de revanche non seulement pour revenir
au monde d’avant, mais aussi pour imposer à l’Europe le « Nouvel ordre
», c’est-à-dire, le nouveau système des relations et des
solutions. Bien entendu, en position de force. Tous les accords signés
auparavant ont été rejetés d’une manière
démonstrative, théâtrale même. Le principe « pacta
sunt servanda » a été rejeté. Rapellons-nous, comment
Hitler a organisé la capitulation de la France : dans la même
remorque ou l’Allemagne avait signé sa capitulation
précédente. Le théâtre. La politique des signes et
des symboles.
Récemment,
le président russe Vladimir Poutine a déclaré le
rattachement de la
Crimée a la
Russie dans la même ambiance.
Aujourd’hui
sur calendrier de l’histoire russe, une chaine logique s’est
définitivement construite: Lénine- Staline –Poutine. Je
félicite les Russes. Même les noms de famille se ressemblent. Par
exemple, comme Kim Il-sung, Kim Jong Il et Kim Jong-eun. Ou bien, comme
ça: 김일성
— 김정일 — 김정은
—, c’est aussi jolie.
Lorsque
le nouveau président Poutine déclarait publiquement ses plans de
revanche , rapellons-nous la
Conférence de Munich sur la sécurité (
en allemand Münchener Sicherheitskonferenz, et an anglais Munich Security
Conference), alors ce discours a été perçu comme une sorte
d’extravagance politique.
Le
discours de Poutine à Munich en 2007 a provoqué une explosion
d’émotions politiques et humaines: le choc, la colère,
l’irritation, la frustration, la confusion, l’étonnement, l’admiration,
la condamnation. L’on pouvait ne pas être d’accord avec lui, mais
c’était là où il a ouvertement montré la position
réelle de la Russie
et sa vision du futur ordre mondial, il a secoué la vieille Europe et la
fait réfléchir au sujet de ses propres priorités.
Il
a accusé les Etats-Unis d’avoir imposé leurs propres normes
juridiques et politiques dans d’autres pays, de compromettre la
stabilité dans le monde dont une des principales menaces est le
monopolisme du monde, le début d’une nouvelle course aux armements
nucléaires, etc. Voici quelques citations du Président de la Fédération
de Russie, qui illustrent le ton et l’accent du message de Russie : « Les
Etats- Unis ont franchi toutes les limites, désormais, plus personne ne
peut être défendu par le droit international », « Les actions
globales des Etats-Unis n’ont résolu aucun problème », « Le
pouvoir que les Etats- Unis s’accordent, détruit ce pays de
l’intérieur ». On dirait le contenu d’une calomnie d’un revanchard. La
même terminologie a été employée par le jeune Adolf
Schicklgruber (Adolf Hitler 1889-1945). À l’époque, personne ne
lui a prêté l’attention, à lui non plus.
Il
est remarquable que le discours de Munich de Poutine est un résultat
d’un événement qui a eu lieu en Ukraine en 2004. À savoir,
le premier « Maidan » orange était ... une tentative
désespérée de l’Ukraine de s’échapper de la
sphère d’influence de la
Russie, car à l’époque, le revanchard Poutine
était déja le président de la Russie. La
révolution orange, quel que soit son résultat, était
l’élément déclencheur pour les revanchards russes. Ils ont
commencé à mettre en oeuvre leurs plans du nouveau partage du
monde. Ce n’est pas pour rien, que les premiers « plans » (faux ou pas)
d’attaque russe sur l’Ukraine se sont apparu dans des sources publiques en
2008. Nous allons les considérer comme la pression psychologique sur l’Ukraine.
Mais Poutine développait et réalisait des plans plus
réalistes de l’occupation rampante » de l’espace post-soviétique
y compris d’ailleurs non seulement les républiques
post-soviétiques comme l’Ukraine et la Bielorussie mais aussi
la Pologne, la Hongrie etc.
Quant
à l’Ukraine, le plan de son absorption devait être plus
délicat, c’est tout de même un grand pays. Il fallait
l’apprivoiser de l’intérieur, non seulement en remplissant tous les
organes de l’état par ses agents directs, du ministre de la Défense
jusqu’au chef du Service de Sécurité. C’était impossible
à cacher. Mais aussi par la démoralisation totale et la
corruption. Les instituts d’État ukrainiens devraient se dissoudre dans
le mélange venimeux de l’immoralité, du cynisme et de la corruption.
Il a presque réussi. Il suffit de se rappeler qu’est-ce qu’est devenu le
système judiciaire ou le Service de Sécurité.
Mais
Poutine n’a pas pris en compte de la spécificité de la
société ukrainienne. En tout cas, de la majorité. Elle a
changé. Pas comme celle-là dont il a l’habitude, pas comme
celle-ci que lui-même a forme en Russie: muette, cynique a
l’intérieur, revancharde.
Et
c’est pour cette raison qu’à la fin de 2013, le nouveau Maidan, que l’on
a surnommé l’Euromaidan, s’est éclatée en Ukraine. Ce
n’était pas qu’une protestation contre une tentative exponentielle
d’humilier et de ramener à l’obéissance la société
ukrainienne, c’est-à-dire, refuser de signer l’accord avec l’association
en obéissant à l’ordre de Poutine. C’était une explosion du
proteste contre le cynisme sauvage et l’immoralité du gouvernement de
l’époque. C’était une protestation de la dignité.
Pourquoi
le Maidan 2013-2014 a-t-il gagne ? Parce qu’il a gagné, il a
remporté une belle victoire et la meilleure preuve de cela est une
hystérie de Poutine qui a perdu son sang-froid en commençant la
guerre russo-ukrainienne en Crimée. Quelqu’un dit que cela n’est pas une
guerre mais juste une intervention. Et non, les guerres sont
différentes. La Russie
a mené la cyberguerre avec la minuscule Estonie en 2007, la guerre «
chaude » avec la Georgie
en 2008. La guerre de 2014 avec l’Ukraine est une guerre à
évincer.
Le
« Maidan » a gagné parce qu’ il s’est retrouvé dans la tendance
mondiale, tout comme le mouvement polonais « Solidarność », le
mouvement lituanien « Sajudis » et comme « Mouvement populaire de l’Ukraine ».
Les deux mondes se sont rentrés en collision sur le Maidan, le monde
pour lequel le proverbe
«
pacta sunt servanda » a du sens et l’autre monde, celui du revanchisme et de la
violence « il fine giustifica i mezzi » (la fin justifie les moyens).
Le
Maidan est devenu non seulement le creuset de cristallisation de la nation
politique ukrainienne moderne, mais il est aussi une pierre angulaire pour le
monde entier.
Le
futur ordre mondial dépend de la réaction du monde sur la
provocation de Poutine. Soit les Etats- Unis et l’Union Européenne
disent oui à ça sans aller à la confrontation mise
à part des sanctions décoratives contre quelques personnes ou
bien, ils acceptent le défi.
Le
Maidan a souligné de principaux problèmes de la
géopolitique moderne. Avant, de nombreux hommes politiques occidentaux ont
essayé de se cacher pour ne pas réaliser à qui ont-ils
l’affaire dans la personne de Poutine. Alors, là, Poutine est un «
Poutine collectif », des forces revanchardes qui aujourd’hui se sont
retrouvées en Russie.
Le
Maidan est devenu un trou étroit à travers duquel nous pouvons
voir l’avenir. Non seulement l’avenir ukrainien, mais l’avenir de tout le
monde. Le principal est de tirer de bonnes conclusions de ce que l’on a vu
grâce au « Maidan ». L’avenir est l’avenir, tant qu’il n’est pas
condamné. Nous pouvons tout faire comme nous voulons. Mais pour cela, il
faut vouloir le faire. Vouloir changer le monde. Mais pour le mieux.
Réaliser le rêve de ceux qui défendaient le « Maidan »
durant de longues nuits glaciales. Pas l’Ukrainien. Non seulement l’Ukrainien.
Mais l’Européen.
Taras Voznyak, Redacteur en chef de revu
intellectuel «¯»
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